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Analyse de la Jurisprudence sur le Crédit d'Impôt Recherche : Jeunes Docteurs

Le 31 mai 2024, le Conseil d'État a rendu une décision clé concernant la restitution du crédit d'impôt recherche (CIR) dans l'affaire opposant la société Awalee Consulting à l'administration fiscale. Cette décision apporte des précisions importantes sur l'interprétation des dépenses de personnel éligibles au CIR, particulièrement pour les docteurs embauchés en CDI.


Contexte Juridique et Fiscal


Le CIR, codifié à l'article 244 quater B du Code Général des Impôts (CGI), vise à encourager la recherche et l'innovation en permettant aux entreprises de bénéficier de crédits d'impôt sur leurs dépenses de recherche. Une disposition spécifique du CIR permet de doubler les dépenses de personnel pour les docteurs pendant les vingt-quatre premiers mois de leur recrutement en CDI. Cependant, cette règle s'applique uniquement si le recrutement est le premier emploi en CDI du docteur.


Litige et Décision


Awalee Consulting, renommée Canopee en février 2024, a contesté la décision de l'administration fiscale de ne pas doubler les dépenses de personnel pour deux de ses employés, M. Le Cavil et Mme Nguyen, qui ont soutenu leur thèse après leur recrutement. L'administration avait refusé la prise en compte des montants doublés au motif que les contrats de travail avaient été signés avant l'obtention de leurs doctorats.

Statut Jeune docteur CIR

Le Conseil d'État a jugé que l'administration avait interprété la loi de manière trop stricte et a statué que l'entreprise pouvait bénéficier de l'avantage fiscal pour la période allant de la date de l'obtention du doctorat jusqu'à la fin de la période de vingt-quatre mois suivant le début du contrat de travail.




Analyse l’avis du rapporteur Public


Le rapporteur public, M. Romain Victor, a souligné l'importance de l'interprétation constructive de la loi fiscale, alignée avec l'objectif législatif de promouvoir l'emploi des jeunes docteurs. Il a recommandé une application pragmatique permettant aux entreprises de bénéficier du doublement des dépenses sur la période éligible quand bien même le diplôme est obtenu après l’embauche.

En revanche, il propose également de clarifier le sujet de la date à laquelle s’ouvre l’avantage et précise que la période de  « vingt-quatre mois suivant [le] premier recrutement » doit être considéré à partir de la date du premier CDI et non à compter de la date à laquelle le salarié est devenu docteur.


Décision du Conseil d’état


Sur la base de ces éléments, le Conseil d’Etat pose le principe suivant :

« Il résulte de ces dispositions que les dépenses de personnel afférentes aux chercheurs et techniciens de recherche directement et exclusivement affectés aux opérations que ces dispositions mentionnent sont prises en compte, au titre du crédit d'impôt qu'elles instaurent, pour le double de leur montant, lorsqu'elles se rapportent à des personnes titulaires d'un doctorat, et ce, uniquement à compter de la date d'obtention du doctorat, si elle est postérieure à leur recrutement. Cette prise en compte ne peut en tout état de cause excéder une durée de vingt-quatre mois suivant le premier recrutement en contrat à durée indéterminée de la personne ».


Il censure donc pour erreur de droit l’arrêt de la Cour d’Appel de Paris, car les juges d’appel avaient rejeté le bénéfice du régime au motif que les salariés n’avaient pas fait l’objet d’un premier recrutement en tant que docteur et n’avaient pas conclu de nouveau contrat de travail une fois leur titre de docteur obtenu.


En d’autres termes, pour les salariés en CDI lors de l’obtention de leur doctorat, le Conseil d’État ne requiert pas d’avenant au contrat de travail initial pour bénéficier du régime jeune docteur. Cependant le point de départ du bénéfice du régime est celui de la date d’embauche en CDI, et non pas la date d’obtention du doctorat.


Impact pour les entreprises


Concrètement, pour une entreprise qui souhaite pouvoir bénéficier du statut JD pour l’un de ses futurs salariés pour une durée de 24 mois, il existe donc deux cas   :


  1. Le futur salarié est déjà diplômé au moment de l’embauche ➡️ RAS, le statut s’appliquera dès le premier jour du contrat ;

  2. Le futur salariés sera diplômé après la signature du contrat ➡️ il sera nécessaire de proposer dans un premier temps un CDD et transformer ce contrat en CDI lors de l’obtention du diplôme de doctorat.


Pour le cas particulier des thèses CIFRE, il devient donc indispensable de maintenir un CDD le temps de la thèse pour pouvoir bénéficier du statut Jeune Docteur.


Conclusion


Cette jurisprudence simplifie la prise en compte du statut Jeune Docteur pour les entreprises, en revanche, pour pouvoir en bénéficier pendant la totalité des 24 mois, il sera nécessaire d’attendre l’obtention du diplôme avant d’embaucher le futur docteur ou de proposer un CDD pour permettre de commencer la collaboration.


Pour consulter la décision complète, cliquez ici.

Références :


  • Conseil d'État, 8ème - 3ème chambres réunies, 31/05/2024, 476354.

  • Rapport public, M. Romain Victor, 22 mai 2024.


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